Cher Noé, cher Jonas (7)

Cher Noé, cher Jonas

J’espère que vous allez bien. Ici les jours se suivent avec des changements plus ou moins visibles. Vous pourrez dire à votre copain Qohélet que j’ai des doutes concernant sa phrase « Rien de nouveau sous le soleil » (Qo 1,9). Plus le temps passe, moins je suis d’accord avec elle. Tous les jours se ressemblent mais aucun n’est pareil. Il y a une vraie différence d’un jour à l’autre et cela tient notamment à la versatilité avec laquelle nous nous relions aux choses. Ce qui nous énervait hier nous fait plaisir aujourd’hui, ce qui nous comble aujourd’hui ne vaudra plus rien demain, tout à l’heure peut-être. Nous sommes ballottés d’une émotion à une autre, d’une envie à une autre et nous voguons d’espoir en désespoir, de détente en crispation. Voilà bien le signe que nous sommes vivants puisque tout ce qui vit change, seconde après seconde. Donc si nous prenons le temps d’explorer les centimètres carré de notre confinement, cette phrase n’est pas très pertinente à un niveau personnel. Mais je crois aussi que cette phrase ne veut absolument rien dire dans la période qui est la nôtre. Aujourd’hui tout bouge, tout change : l’ordre du monde, notre vie quotidienne, notre façon de voir la vie. Tout est neuf et inédit. Tout est possible.
Peut-être que la phrase de Qohélet n’est vraie qu’au soleil ? Alors peut-être oui…La nouveauté qui est la nôtre vient de la pluie et de la nuit dans laquelle nous nous trouvons. Tous les commencements se font de nuit. Il faut être dans l’obscurité la plus sombre pour arriver à percevoir une étoile, une étincelle, une façon différente de vivre sa vie, une possibilité de désobéir à ses peurs,… « Tous les grands commencements se font de nuit ». C’est le moment de ne pas se laisser endormir, c’est le moment d’ouvrir les yeux. Sans le vexer, peut-être que cette phrase aurait été meilleure que « rien de nouveau sous le soleil » ?
Je vous laisse décider de ce que vous transmettrez,
bises
Marie-Laure

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