Cher Noé, cher Jonas (47)

Cher Noé, cher Jonas,

J’espère que vous allez bien ! Le vent souffle et il est plutôt chaud. Nous n’avons pas été confis de peur, ce n’est pas le moment de déconfire. Déconfinement. Le mot revient à chaque phrase. Pour le mot, la chose est simple. Les problèmes arrivent avec l’action. Faut-il parler du fait « d’être déconfinés » ou de « se déconfiner » ? Si on nous déconfine, l’action est passive. Il y avait une loi, des limites et des horaires. L’État décide que tout cela n’a plus cours et nous voilà libérés (ou presque). Nous subirons donc les décisions d’en haut, sans y participer pleinement, sans les vouloir ou du moins sans les choisir. Dans ce cas, nous sommes en état de minorité, avec une autorité qui donne ses ordres alors même que le surplomb qu’elle a de la situation ne saute pas aux yeux. L’autre possibilité, c’est que, lundi, nous nous déconfinions. L’idée me plaît beaucoup. Il s’agira de poser un acte, de rentrer pleinement dans un autre statut comme nous avons choisi d’accepter la règle précédente. C’est là la première des libertés, l’autonomie, à savoir la capacité qu’a chaque personne de se donner à soi-même sa propre règle, les limites dans lesquelles elle accepte de vivre. Notre autonomie peut nous faire accepter les règles du confinement et accepter d’en changer. Dans ce sens, nous n’obéissons pas aux règles du confinement, nous y consentons. Et je crois que c’est quand même un peu ce que l’on a fait puisque parfois on ne les a pas acceptées tout à fait… J’ai donc en tête que lundi matin nous allons nous déconfiner nous-mêmes, comme des adultes que nous sommes pour continuer notre vie normale différemment. Vous jugerez peut-être que tout cela est une affaire de mots. Pourtant se déconfiner, se confiner et non pas être confinés c’est garder un droit sur sa vie et sur ses actions tout en pouvant rendre des comptes au besoin. Etre responsable de sa vie, ce n’est pas la laisser entre les mains de l’État ou d’une autre puissance, mais c’est pouvoir en rendre compte. Cela suppose d’avoir le choix, de l’investir et de discuter en conscience des limites. Cher Noé, cher Jonas, je pense qu’en accord avec ce qui m’est demandé, lundi je me déconfine.
Je vous embrasse,
Marie-Laure

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